Analyses

PEFC : les 3 failles majeures à corriger

C’est un petit logo discret que l’on trouve sur de nombreux produits du quotidien : PEFC. En théorie, cette certification...

Publié le Rédigé par Canopée

C’est un petit logo discret que l’on trouve sur de nombreux produits du quotidien : PEFC.

En théorie, cette certification est censée garantir que les produits en bois, ou à base de bois (papier, carton…), que vous achetez, sont issus de forêts gérées durablement.

En pratique, cette certification s’est révélée largement insuffisante, notamment pour encadrer les coupes rases.

PEFC a ouvert une consultation pour réviser ces règles de certification : en amont de cette consultation, Canopée a participé activement aux travaux de révision de ce référentiel.

Si nous pouvons nous réjouir d’un référentiel plus solide que le précédent, nous regrettons que des failles majeures subsistent décrédibilisant l’ensemble du dispositif. 

Voici notre analyse et comment agir.

Faille #1 : Un pin et tout fout le camp

⚠️ Le problème : La transformation est un terme technique très précis en foresterie. Il s’agit d’une coupe rase visant à modifier la composition d’un peuplement forestier par substitution d’essences (Y.Bastien, Vocabulaire forestier, 2011). Par exemple, raser une forêt diversifiée de feuillus pour la remplacer par une plantation de pin maritime. 

Plutôt que de reprendre cette définition, PEFC a préféré en inventer une nouvelle… s’exposant ainsi au lobbying d’acteurs ayant un intérêt à la vider de son sens. C’est ainsi que la transformation a été définie comme le « renouvellement par une plantation d’une forêt régénérée naturellement. » et qu’une subtile note a été ajoutée: «Le renouvellement par plantation ou semis avec les mêmes essences dominantes que celles qui ont été récoltées ou d’autres essences caractéristiques de l’écosystème forestier considéré n’est pas une transformation ».

Une note qui ouvre une exception lourde de conséquences. Sur toute la façade Ouest de la France, le pin maritime est plus ou moins commun et peut donc être « considéré comme caractéristique de l’écosystème forestier considéré ». Si l’on reprend notre exemple, le remplacement d’une forêt diversifiée par une monoculture de pin maritime n’est plus considéré comme une transformation (et échappe ainsi à l’obligation de diagnostic).

🛠 La solution : Revenir à la définition usuelle et admise de transformation ou supprimer la note ouvrant une exception pour les “autres essences caractéristiques de l’écosystème forestier”.

Faille #2 : Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage

⚠️ Le problème : Parfois, les coupes rases sont indispensables. Par exemple, en cas de problème sanitaire. Mais trop de coupes rases sont abusives. Une triste astuce, que nous avons dénoncée dans notre rapport sur le bilan caché du plan de relance, consiste à qualifier un peu trop facilement des forêts de « pauvres » ou de « vulnérables ». 

La notion de « pauvreté » est une notion économique très relative. D’abord, parce qu’une forêt « pauvre » économiquement peut avoir une grande valeur écologique. Ensuite, parce qu’elle est liée à la capacité de valoriser le bois : de nombreuses forêts « pauvres » sont composées de bois de feuillus de qualité secondaire (arbres un peu tordus ou avec des défauts) ou moins recherchés par les scieries. Plus le nombre de petites et moyennes scieries disparaît sur un territoire, plus le risque est mécaniquement grand de qualifier les forêts de “pauvres”. Conséquence directe : ces forêts sont rasées, le bois part en bois énergie (ou trituration) et elles sont remplacées par des monocultures de résineux, très recherchés par le marché.

La notion de “vulnérabilité”, et surtout l’utilisation qui en est faite, est encore plus dangereuse. Elle est définie par PEFC comme un « peuplement ne présentant pas encore de signes de dépérissement irréversible mais dont l’avenir pourrait être compromis en raison des essences qui le structurent ». C’est simple, selon le scénario de changement climatique envisagé, c’est l’ensemble de la forêt française qui peut être considérée comme “vulnérable”. Donc rasée et remplacée, là encore, par des plantations.

🛠 La solution : Les coupes rases doivent être une exception. Elles doivent avoir lieu uniquement lorsque les peuplements forestiers ne sont pas améliorables par une autre option technique. PEFC doit se mettre en conformité avec le nouveau règlement européen pour interdire la mise sur le marché de produits issus de la déforestation et de la dégradation des forêts. La conversion d’une forêt qui se régénère naturellement en plantation est considérée comme de la dégradation. Les produits ne pourront donc pas être mis sur le marché européen : il serait fâcheux que PEFC les certifie comme issus d’une forêt gérée durablement.

Dans les autres situations (taillis, peuplements issus de plantation…), la priorité doit être donnée d’abord à l’amélioration par des travaux de type balivage ou éclaircie. De même, la notion de problème sanitaire doit être précisée : un peuplement mélangé avec 20% de frênes qui meurent à cause de la chalarose n’est pas un peuplement condamné. 

Le référentiel devrait donc préciser explicitement que « seuls les peuplements non améliorables peuvent être concernés par la coupe rase » et fixer comme seuil la présence « de moins de 100 tiges d’avenir par hectare » pour qualifier un peuplement de non améliorable.

Faille #3 : Des seuils d’encadrement de coupes rases insuffisants

⚠️ Le problème : les coupes rases ont de nombreux impacts négatifs et devraient être mieux encadrées, comme l’a montré l’expertise collective «CRREF-Coupes Rases et REnouvellement des peuplements Forestiers en contexte de changement climatique». Si cette expertise ne préconise aucun seuil maximum précis pour limiter la taille des coupes rases, elle montre clairement que plus la coupe rase est grande et plus les impacts sont lourds. Plutôt que de fixer un seuil clair, PEFC propose une « cible » oscillant entre 5 et 10 ha, avec des possibilités de dérogations. Les motifs permettant de déroger ne sont pas précisés. Pire encore, les coupes rases dans des « plantations monospécifiques » n’ont aucune limite de surface si « la coupe est prévue dans le document de gestion durable ».

🛠 La solution : Les coupes rases devraient être limitées à un seuil maximum de 4 ha. Dans les zones de forte pente et les zones de forte sensibilité paysagère, PEFC propose de ramener ce seuil à 2 ha, sans exception, ce qui est une bonne logique – mais le seuil devrait être de 0,5 ha. Ce seuil devrait également être appliqué aux forêts en zone Natura 2000. Une exception pourrait être possible pour les plantations monospécifiques si le propriétaire s’engage dans une logique de diversification et de restauration écologique. Un seuil maximum de 10 ha devrait encadrer cette exception.

Des failles majeures à corriger, de nombreuses zones d’ombre à consolider

Ces trois failles constituent des failles majeures. A l’issue de la consultation publique, si elles ne sont pas refermées, c’est la crédibilité même de la certification PEFC qui est en jeu.

D’autres points méritent d’être consolidés pour que les consommateurs puissent véritablement faire confiance à ce label :

  • Les règles pour éviter le cumul de « petites » coupes rases devraient être clarifiées en précisant par exemple : « qu’un même propriétaire ne peut pas raser plusieurs parcelles contiguës sur une période de 5 ans et seulement après reconstitution d’un peuplement d’avenir ayant atteint au moins 5 mètre de haut » ;
  •  Les zones forestières de haute valeur écologique doivent intégrer les zones Natura 2000 et les ZNIEFF de type 1 ;
  • La désignation de 5 arbres habitats par hectare et la constitution d’îlot de sénescence représentant au minimum 3% de la surface doit être un critère obligatoire pour reconstituer une trame de vieux bois (10 arbres / ha et 5% dans les zones forestière de haute valeur écologique exploitée) ;
  • L’utilisation de produits chimique de synthèse en forêt doit être clairement proscrite (seule l’utilisation d’herbicide est proscrite par le projet de référentiel PEFC) ;
  • L’extraction des souches, très néfaste pour les sols, doit être clairement proscrite ;
  • L’introduction d’essences exotiques est à mieux encadrer, et l’exclusion de l’eucalyptus devrait être explicitée.

Bonifier les aides publiques à la certification ?

Dans le cadre du dispositif France 2030, les propriétaires bénéficient d’un bonus de 15% s’ils sont certifiés PEFC ou FSC (dont le référentiel est également en cours de révision). Encore faudrait-il que ce bonus soit justifié, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Sur plusieurs points clés, la certification PEFC se limite au simple respect de la loi. Pire, le projet de référentiel PEFC est moins exigeant que les critères France 2030 sur la définition de peuplements pauvres ou vulnérables.

Nous sommes favorables à une bonification si elle est basée sur une plus-value environnementale. Il est donc indispensable que les pouvoirs publics clarifient leurs exigences vis-à-vis des deux systèmes de certification et surtout s’engagent à les comparer, de façon objective, à l’issue de la révision des deux référentiels. Cette comparaison doit permettre de justifier, ou moduler, le bonus accordé.

JE SIGNE LA PÉTITION POUR UN LABEL QUI PROTÈGE VRAIMENT LES FORÊTS

JE SIGNE LA PÉTITION